lundi 21 janvier 2008

Tabou.

Je suis névrosée moi, et je parle trop, tout le temps. J’en suis venue à sentir que certaines personnes évitaient d’entamer des conversations avec moi. On me connait, on sait. Moi, j’ai pas la langue dans ma poche. Rien ne m’empêche de rien, rien n’est à cacher. Pourquoi ne pas dire?

Je dis donc tout, mais aussi je ne dis rien. Ce que les autres disent ouvertement et sans gêne, c’est ce que moi je n’arrive pas à exprimer. Je refoule, je garde tout pour moi. Je dis ce qu’il ne faut pas dire en m’étonnant de le dire au lieu de dire le reste. Et c’est toujours comme cela.

Ainsi donc j’exprime mes fantasmes les plus étranges à mes amies et connaissances, les rendant mal à l’aise en riant. Je leur demande de me parler de leurs sous-vêtements sexys et aussi de leur corps. Ils rougissent et répondent parfois. Ils me demandent pourquoi je demande, je dis pourquoi pas. Ensuite ils me parlent de leurs vies, de leurs craintes, leurs joies, et moi je ne dis plus rien. Ils me demandent mon avis et c’est alors que je rougis. Penser à l’avenir, c’est complètement fou pour moi. C’est mon tabou avec moi-même, un murmure parfois évoqué dans mes pensées, repoussé aussitôt.

Mes mains, mes actes sont souvent eux-mêmes hors de mon contrôle et agissent d’une façon jugée absolument tabou par mes compagnons ahuris. Je réalise que je ne suis à l’aise qu’avec moi-même, que les autres autour de moi créent un sentiment incontrôlable de me donner en spectacle. Sauf chez moi, avec mes colocs. Tellement souvent, je me retire dans ma chambre, je les déteste en silence. Elles me mettent hors de moi. Je voudrais tellement vivre sans elles, seule dans ma bulle résidentielle. Je rêve la nuit que je pête les plombs, que je leur crie tout ce qui est tabou, ce que je retiens en dedans de moi, ce qui pile sur mon âme depuis trop longtemps. Elles ne me font que penser à ces choses, à ces responsabilités, ces peines, ces frustrations. Elles sont fausses et elles me dépriment.

Et ma colère est taboue, et mon existence crie par mon sourire. Tout cela est tabou, n’en parlons pas.

Texte créé pour le prochain numéro de la revue Artichaut, dont le thème sera «tabou». Montré d'abord à Francis, puis, en étant rassurée comme quoi ça se tient, je vous le montre, chers lecteurs.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Et si TU nous parlais de tes sous-vêtements sexys et de ton corps?

Yano a dit…

Belle réflexion dans ce texte!

Monsieur l'adulte a dit…

Merci pour cet ouverture sur ton monde. J'aime bien apprendre les gens à travers leurs blogues.

Anonyme a dit…

Chère Caro! Je dois dire que je te comprends entièrement à travers ton billet (tabou).J'ai parfois aussi l'impression d'être dans "une classe à part".

Mais finalement,nous n'avons pas été élevé avec les mêmes valeurs que les autres..ce qui fait notre différence selon moi.Pour ça que je m'appelle "spécimen de la société" hehe:P.

Tu ne devrais pas garder tout cette "colère ou choses que tu n'oses dire " à l'intérieur...quand ça va sortir ,ça ne sera vraiment pas beau ;).Canalise Caro!! hahaha!

Bref je me suis peut-être égaré du sujet hahah ,j'avoue être içi mais pas la aujourd'hui hehe:P.Mais bon j'espère avoir dit certaines choses cohérente :) Beau billet va s'en dire!

Anonyme a dit…

bon text qui nous pousse a a faire la comparaisons sur sois-même...

-CaR0- a dit…

Vos commentaires sont tellement agréables à lire!
@lapinblanc: non. lol. À moins de faire un nouveau billet de littérature érotique.

@yano: merci beaucoup.

@monsieur l'adulte: n'oublies pas que c'est exagéré, c'est pas totalement vrai là là.

@Eric: J'aime bien ton commentaire. Tu as su démêlé ce qui semblait fictionnel et ce qui était davantage ressenti. Merci.

@yann: merci beaucoup de me lire et de prendre le temps de réfléchir à ce que j'écris. Bisous!

Bonne journée à tout le monde! -xx-

Plume a dit…

Merci beaucoup de partager ce texte avec nous, c'est intense comme je les aime. Dis tu prendrais pas l'autobus 27 st-Joseph parfois, genre par hasard? lol :) J'ai eux l'impression confuse de t'avoir croisé sans savoir pourquoi j'ai pensé ça :P

unautreprof a dit…

un texte qui me "parle" (oh quel jeu de mot!) beaucoup.

Je peux baratiner sur pas mal n'importe quoi, déconner sur le sexe, mais comme toi, j'ai besoin de ma bulle immense et "Je réalise que je ne suis à l’aise qu’avec moi-même"